Aperçu sur le Liban


  • Beyrouth, Mille Fois Revécue

     

    L’article 4 de la constitution de la République Libanaise dispose :

    « Le Grand Liban est une République. Beyrouth est sa capitale. »

     

    Cette consécration de Beyrouth comme capitale de la République Libanaise, le 23 mai 1926, était la conséquence naturelle du développement de cette ville portuaire depuis plus de deux siècles. Ancienne possession des Emirs druzes de la Montagne, du Maanide Fakhreddine II notamment, elle avait été, en 1888, détachée du vilayet de Syrie pour constituer le chef-lieu du vilayet de Beyrouth dont le territoire comprenait, au sud, les sandjaks de Beyrouth (avec les cazas de Saïda (Sidon), de Sour (Tyr) de Marjayoun, de Akka (Acre) et de Balqa’ (Naplouse ou Nablos) et, au nord, de Tripoli et de Lattaquié,  chacun d’eux divisés en cazas et mudiriehs.[1]

     

    En 1979, la poétesse libanaise, Nadia Tuéni dédie un poème d’amour adressé à Beyrouth, et qui s’avère prémonitoire du destin de cette capitale :

     

    « Qu’elle soit courtisane, érudite ou dévote, péninsule des bruits, des couleurs et de l’or, ville marchande et rose, voguant comme une flotte, qui cherche à l’horizon la tendresse d’un port, elle est mille fois morte, mille fois revécue. »

     

    Depuis l’explosion du port de Beyrouth le 4 Août, 2020, ce poème résonne comme une vérité indicible de ce qu’il y a de vrai, de beau et de tragique dans cette ville, que l’histoire continue d’ébranler par ses battements souterrains. De ces battements, Beyrouth n’a de cesse de subir, qui brisent le cœur des Beyrouthin(e)s, comme si la vie leur exige un tribut lourd pour avoir voulu incarner pleinement le Levant du vivre-ensemble sans distinction de religion ou de confession. Un vivre-ensemble marqué également par le patrimoine architectural de Beyrouth, qui offre à l’humanité une esthétique intemporelle, et qui s’approprie le meilleur des différentes époques qui se sont succédées. La liste de ce patrimoine est longue. Nous retenons, non sans difficulté vu l’abondance de ce patrimoine et de sa richesse, “Le Grand Théâtre des Mille et Une Nuits ”, populairement désigné par Teatro el Kabir, qui est pensé dans les années 1920 par l’architecte Youssef Aftimos, à qui l’on doit plusieurs réalisations majeures de la capitale. Avec une architecture à mi-chemin entre orientalisme et vénitien n’ayant rien à envier aux opéras de Moscou ou de Paris, le Teatro el Kabir fut inauguré en 1929, et ses planches voient défiler toute la scène artistique de l’époque. En 1946, la Comédie française y joue ses plus grandes pièces. Tout le monde se hâte pour assister aux représentations des Mal-aimés de Mauriac, du Tartuffe et du Don Juan de Molière et encore du Cyrano de Rostand. Bien évidemment, on y admirait les plus grandes stars arabes de l’époque, Mohamed Abd El Wahab ou encore Oum Kalthoum, rien que pour entendre son Enta Omri résonner dans cette salle à l’acoustique exceptionnelle. Aujourd’hui, pour survivre et vivre, il faudrait sans aucun doute sauver ce patrimoine séculaire et le valoriser.

     

    Accablé d’histoire, Beyrouth demeure le symbole d’une histoire millénaire, et donc d’une identité, et par conséquent d’une vérité séculaire, qui puise sa force dans la lueur d’espoir qu’offre à l’Homme libre le droit et la justice. Baptisée par Justinien « nourricière des lois », l’École de droit de Beyrouth (Béryte) (Vers 200 AP. JC) abrita, trois siècles et demi durant – longévité record pour l’époque, jusqu’au terrible tremblement de terre en 551 où 30 000 Beyrouthins périssent dans des conditions tragiques-, une pléiade de professeurs dont l’œuvre a marqué les compilations de Justinien, sans lesquelles compilations, comme le note le professeur Maillet, « les droits modernes seraient nettement différents de ce qu’ils sont ». Une question s’impose : pourquoi Beyrouth fut choisi parmi toutes les villes de la méditerranée comme le berceau d’une des plus illustres facultés de droit de l’époque romaine, d’où d’ailleurs toute la jurisprudence romaine est issue, et comme centre de dépôt des constitutions impériales ?

     

    A cette question, M. Emile Bejjani, ancien membre du Conseil constitutionnel Libanais, avance des arguments très pertinents[2], qui sont d’ailleurs toujours d’actualité, après presque deux mille ans. Nous en retenons principalement les quatre facteurs suivants :

    • Les langues (un plurilinguisme prononcé ; mais principalement le latin et le grec, vient ensuite les langues anciennes comme l’araméen, le syriaque ou le copte…) l’emplacement de Beyrouth en tant que carrefour et lieu de passage des idées et des choses : entre Nahr el-Kalb et la plaine de Damour, protégée par le cap de Ras Beyrouth et sa côte taillée en dentelles, se situent la ville et son port reconnu « porte de l’Orient ».
    • La qualité et le niveau de l’enseignement prodigué à Beyrouth, qui attiraient des étudiants de tous les coins du monde, l’Europe, l’Afrique, l’Asie mineure, Constantinople même où monte en même temps une faculté de droit qui bénéficie des faveurs et de toutes les attentions de l’empereur. Les lettres de Libanius, rhéteur dirigeant une école d’éloquence à Antioche, pullulent de recommandations en faveur d’étudiants désireux d’étudier le droit à Beyrouth : Suivre des études de droit à Beyrouth était chose tellement enviable qu’il a fallu, un jour, l’intervention de l’empereur afin d’exempter des étudiants de Petra, avancés en âge et passionnés de droit, de la limite d’âge, selon les règlements fort rigoureux de l’École.
    • La science au niveau de la technique juridique, mais aussi la ligne de conduite et l’idée morale, expliquent le prestige, la hauteur de pensée et la renommée mondiale de leur école. Les étudiants étaient initiés à la réflexion philosophique (philosophie politique, philosophie du droit et philosophie morale notamment), le but était de les faire réfléchir sur l’expérience du droit et de l’Etat dans les sociétés humaines et les préparer à affronter les grandes questions morales et politiques : Ulpien, athée, envisageait la mission du jurisconsulte comme un « sacerdoce ». « Nous cultivons la justice, écrit-il, nous professons la connaissance des règles de droit, séparant l’équitable de l’inique, le licite de l’illicite. » Une telle définition sonnait fort à l’époque, et continue de motiver les libres d’esprit, surtout à cette époque charnière.
    • L’idée de liberté qui souffle sur ce promontoire beyrouthin depuis l’époque romaine. Un professeur de Beyrouth n’était pas seulement un sage ou un habile et savant rédacteur de textes et de dissertations juridiques. Esprit libre et solidement personnel, il poussait l’audace jusqu’à braver la volonté impériale. Cette passion pour la liberté a fait de Beyrouth, tout au long de l’histoire, le foyer de prédilection de propagation des idées, les plus audacieuses, et rend justice à cet adage tant répandu : «Le Caire écrit, Beyrouth édite et Bagdad lit», dit-on chez les intellectuels du monde arabe depuis la Nahda jusqu’à la fin des années 70 du dernier siècle.

     

    Cette prépondérance intellectuelle de Beyrouth depuis l’époque romaine jusqu’à aujourd’hui, témoigne de l’héritage du capital humain de cette cité, qui est toujours riche de ses institutions éducatives, et qui façonne l’identité libanaise et levantine.

     

    Hamra, Ashrafieh, Ras el nabeh, Basta, Dar el Fatwa, Verdun, Raouché, Ain el Mreissé, Kantari, Clémenceau, Patriarcat, Gemmayzé, Mar Nicolas, Nasra, Badaro, plus loin, les banlieues de Dora, Bourj Hammoud, Sin el Fil, Furn el Chebak, Ouzai, et Khaldé… tout un paysage aux couleurs des Mille et Une Nuits, qui ne cessent de fasciner.

     

    Beyrouth, mille fois morte, mille fois revécue, vaincra.

    Paix à toutes les victimes tombées au théâtre de cette cité-patrimoine mondiale.

     

    [1] Edmond RABBATH, La constitution Libanaise, Origines, Textes et Commentaires, Beyrouth : Publications de l’Université Libanaise (Librairie Orientale), 1982, p.76.

    [2] Emile BEJJANI, L’Ecole de droit de Béryte, pourquoi ?, dans L’Orient-Le Jour, du 6 janvier 2011.

     

  • Le littoral libanais constitue la façade maritime du pays et se situe sur l’extrémité de l’Asie du Sud-Ouest. En partant de Ras al-Naqura, au sud, une étroite plaine côtière remonte vers les ports de Tyr et Sidon, pour atteindre le port principal du Liban : Beyrouth. En partant un peu plus vers le nord, la plaine s’élargit progressivement, à partir de la baie de Junié, vers les ports de Byblos et de Batrun pour aboutir à l’important port de Tripoli et se terminer au Nahr al-Kabir. Au vu de son positionnement unique, le littoral du Liban, qui s’étend sur 220 km sur le bassin levantin, constitue un carrefour civilisationnel depuis des milliers d’années. Selon plusieurs scientifiques et anthropologues, des quinze colonies les plus anciennes du monde, treize sont situées au Moyen-Orient, et cinq plus particulièrement au Liban : Tyr, Sidon, Byblos, Beyrouth, et Tripoli.
  • A l’est de la côte libanaise, étroite et fertile, s’élève la chaîne du Mont-Liban. Cette chaîne, montagneuse, dont l’altitude moyenne est de 1930 m, compte plusieurs sommets, parmi lesquels le Mont Sannin et le Mont al-Munaytra, pour culminer à 3090 m avec le Qurnet al-Sawda’. La chaîne s’abaisse régulièrement vers le sud, pour aboutir en pente douce vers la mer. Son versent occidental est couvert de pins, et à basse altitude, de cultures fruitières. Cette chaîne de près de 160 km de long et 40 km de large, est riche en rivières. Le versant oriental du Mont-Liban s’abaisse en pente brusque vers la plaine de la Békaa.

     

    Pour qui a contemplé de haut et parcouru le massif du Liban, son versant rocheux sinueux et celui des cèdres gracieusement dominant ce long littoral étroit qu’est la façade maritime du pays, le Mont-Liban demeure l’objet de fascination et d’engouement vu le rôle historique qu’il incarne dans la formation du grand Liban. Mentionné dans trois des douze tablettes de l’Épopée de Gilgamesh, dans des textes de la bibliothèque d’Ebla (2400 av. J.-C.), ainsi que 71 fois dans l’Ancien Testament, l’histoire du Mont-Liban se peint sur un fond de paysages, d’Hommes et d’institutions éducatives qui ont trouvé refuge afin de bâtir pleinement leurs cultures. Ce particularisme a irrigué le débat des historiens. Au-delà des concerts de radicalités stériles, le Mont-Liban cultive une symphonie très souvent ignorée, celle de l’intuition poétique. De Gibran Khalil Gerbran, en passant par Nerval et Lamartine, plusieurs poètes ont savouré la musique indicible de cette Montagne : cette symphonie intime qui ne cesse de battre au rythme de la liberté tant chérie en Orient.

  • La plaine de la Békaa est située entre les chaînes du Mont-Liban, à l’ouest, et de la chaîne de l’Anti-Liban, à l’est, et elle couvre environ 4000 km carrés, soit plus du tiers de la surface du Liban. Longue d’environ 120 km et large de 8 à 14 km, cette plaine, qui est particulièrement fertile malgré une altitude moyenne d’environ 900 m, témoigne également de sa riche histoire millénaire :

    • Baalbek, qui culmine à environ 1160 m, remonte au moins à la fin du IIIe millénaire av.J.C, et demeure le cœur battant de cette plaine grâce, entre autres, aux trois temples édifiés par les romains à la demande de l’empereur Auguste : le temple de Bacchus qui est l’un des temples de l’époque romaine le mieux conservé au monde, l’imposant temple de Jupiter (le plus ancien des trois mais également le plus grand de l’empire romain (88m par 48m), et le temple de Vénus avec son architecture très particulière ;
    • Zahlé, qui transporte dans le temps et l’espace le voyageur tant cette ville se démarque par son identité et ses coutumes culinaires et littéraires ;
    • ou encore Anjar, le berceau des Omeyyades.

    Aujourd’hui, la Bekaa continue à être le grenier à blé du Liban, et incarne fièrement sa tradition viticole et agricole.

  • C’est la plus orientale des deux chaînes qui composent le relief montagneux du Liban. La chaîne de l’Anti-Liban est parallèle à celle du Mont-Liban sur environ 100 km. Force est de constater le mysticisme de cette région : la montagne a un aspect massif et ramassé, ce qui en fait un obstacle difficile à franchir. Le relief n’y est pas aussi abrupt que le versant du Mont-Liban. Ses hautes surfaces tabulaires s’élèvent à plus de 2 500 m. Elle se divise en deux parties, séparées par le col de Deir el Achayer par lequel passe la route qui relie la Bekaa Libanaise à Damas. La section nord de l’Anti-Liban culmine à 2 670 mètres au Talat Moussa. La section sud, le mont Hermon (Jabal el-Cheikh, en arabe), qui est un sommet libanais, culmine sur la frontière libano-syrienne à 2 814 mètres d’altitude. C’est une pyramide imposante qui domine la Bekaa méridionale et le Golan.

     

    Sur le plan hydrographique, le Liban est riche par ses fleuves, comme Nahr al-Kabir, Nahr Ibrahim et le Nahr el-Kalb, plus connus respectivement sous les noms d’Eleuthérus, Adonis et Lycus pour les Anciens. Cependant, les principaux fleuves du pays restent le Nahr al-‘Asi, ou Oronte long d’environ 600 km, qui prend sa source au Liban, plus spécifiquement au Hermel à Aïn el Zarka, traverse la Syrie jusqu’à la Turquie, le Nahr al-Litani qui est long de 140 km, prend sa source près de Baalbek, avant de se jeter dans la méditerranée près de Tyr, le Jourdain qui prend sa source au Liban, plus particulièrement au pied du Mont Hermon, dans le district de Hasbaya, s’écoule sur 360 km, et le fleuve du Barada qui prend sa source au sud des montagnes de l’Anti-Liban.

     

    Pour plus d’informations sur le tourisme au Liban, veuillez consultez le site du Ministère du Tourisme.


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